Un procès contre les femmes maliennes

"Autrefois la mère illetrée ou instruite dans nos familles s'est toujours occupée de ses enfants ". Une accroche qui annonce un véritable pamphlet contre la femme moderne au Mali. Une femme bien loin de celle que nous connaissons et loin de celle que nous sommes en occident. Voici une des réalités auxquelles nous nous retrouvons parfois confrontées. S'acclimater, respecter et adopter les us et coutumes du pays, il le faut quand on y vit et y travaille. Mais soyons honnêtes, pour une française jouissant de toutes ses libertés, des libertés aquises au cours d'une évolution continue de la condition féminine vers une émancipation, ces dogmes ne peuvent être intégrés. Le Mali est un pays à cheval sur ses traditions. Il travaille chaque jour pour les préserver, bien que ses habitants les jugent de plus en plus "occidentalisées". L'Essor, quotidien national d'informations générales du pays, se tranforme régulièrement en ring où pleuvent les coups portés aux dérives des sociétés occidentales. Les journalistes, très informés sur le reste du monde, d'ailleurs bien plus qu'en France, échangent sur le monde et ses pratiques, déplorant une perte lente de leurs valeurs. Chaque semaine, le journal consacre une page entière à la Femme. Cette semaine, l'article titre "Femmes actives: la difficulté d'être une bonne maman", ou comment les femmes qui travaillent passent à côté de leur vie familiale. " La relation avec un enfant exige une présence quotidienne et instantanée.Malheureusement, sans états d'âmes, les épouses actives choisissent de conserver leur emploi au détriment de l'éducation correcte de leurs rejetons ", précise l'auteure du papier. Il peut paraître logique pour beaucoup que la femme, dans un pays comme le Mali, n'est pas aussi émancipée qu'en France, mais s'y retrouver confrontée est tout autre chose. Un vrai choc. Cet article, ou plutôt ce pamphlet, moralise sur trois feuillets les femmes actives. Selon la rédactrice, la femme ne peut pas être "au four et au moulin", autrement dit si elle exerce une activité professionelle, elle éduque forcément mal ses enfants. "Elles ne bénéficient pas de l'état d'esprit serein pour bien tenir la cuisine et le foyer. Elles s'offrent les services d'une bonne à tout faire". Une affirmation faite en plus par une journaliste d'une vingtaine d'année. Une réalité au Mali difficile à admettre pour nous françaises, alors que nous nous sommes battues pour éradiquer l'assujetissement des femmes tant au point de vue du droit que des us et coutumes. Depuis hier, la rédaction débat sur ce papier: "Nous allons droit vers une occidentalisation de la femme. Nous perdons nos valeurs familiales". Alors que les traditions accordaient en France, jusqu'au milieu du 20ième siècle, une importance au rôle social de la femme au foyer, qui devait se consacrer aux tâches ménagères, à la reproduction et à l'éducation, ce qui bien évidemment n'excluait pas l'exercice d'une profession, ces valeurs maliennes aparaissent comme un vrai retour en arrière pour nous. Le choc d'une réalité que nous n'avons d'ailleurs pas connu, nous, la nouvelle génération, née après le dur combat des militantes qui nous ont précédées. Elodie